La cravate
Les deux hommes m'attendent devant le club sur le bord du trottoir. Ils s'installent derrière et celui qui a l'air un peu moins paqueté que l'autre me dit qu'il y aura deux arrêts. Un dans le centre-ville et l'autre dans NDG. Il n'a pas le temps de finir sa phrase que j'ai déjà ajouté un dollar au compteur. Quand les bars ferment, j'essaye de garder le taxi en mouvement et qui sait, je sauve peut-être juste assez de temps pour faire un ou deux courses supplémentaires avant que le rush se termine. Assez typique comme course. Deux confrères de bureaux qui allongent un 5 à 7 jusqu'à la fermeture des bars.
— Pis je te l'avais-tu dit ou j'te l'avais pas dit? dit l'homme qui m'a dit où il voulait qu'on se dirige
—...
— Han t'en as eu pour ton ptit change han? J'te l'avais-tu dit où j'te l'avais pas dit?
— Arheu... peine à articuler l'autre gars qui est dans un état de baloune pétée avancé.
Pendant qu'ils font du sur place verbal, je clenche rapidement en direction du centre-ville. J'ai un peu peur que l'hébété se mette à dégobiller, mais tant et aussi longtemps que monsieur "j't'e l'avais tu dit " l'entretient, je crois que je peux continuer de peser dessus.
Les deux hommes sortent d'un club de danseuses dans l'Est puis de toute évidence, celui qui peine à articuler s'est fait payer une sacrée traite. Malgré que l'alcool fausse la donne, on peut lire dans son visage qu'il n'en revient toujours pas. Il a dû se faire faire des choses qu'on peut juste imaginer.
— J'te l'avais dit han? Continue de répéter son confrère qui lui dit à demain quand je le dépose devant un stationnement de la rue Mansfield.
— Han, euh demain? Euh... Arheu.
Je ne lui laisse pas trop le temps de se réorienter. Dès que la porte se referme, je me remets en quatrième vitesse vers Notre-Dame-de-Grâce. Sur l'autoroute Ville-Marie, j'arrive à comprendre qu'il veut aller sur Old Orchard. Il s'écroule ensuite de tout son long sur la banquette. Dans l'état dans lequel il se trouve, j'aurais sans doute pu rouler jusque sur la plage du même nom, aux États. Mais j'ne suis pas sûr que ça me tente de m'éterniser avec lui. Les vautrés se vident souvent le ventre.
Alors qu'on est sur le point d'arriver, j'entends le type derrière qui s'ébroue (dans le toupet). Sur sa rue, il se relève, m'arrête, me met dans la main quelques billets qui couvrent amplement le prix de la course et il sort sans demander son dû. Je ne prends même pas le temps de voir où l'homme entre, du bout de la rue, je l'imagine en train de chercher son trou de serrure.
De retour « Downtown» j'arrête le taxi devant trois filles qui sortent du Cheers sur Mackay. Elles s'assoient toutes les trois derrière et une d'elles nous montre une cravate, celle de mon dernier passager. Une belle cravate bleue avec des CH dessus. Elle est toute fière de sa trouvaille et pousse sa fièvre du hockey jusqu'à se la passer dans le visage en chantant des Go Habs Go.
Je repense alors à la course précédente et me dis que c'est loin d'être un hasard si le type a laissé sa cravate là. Dieu sait par où elle est passée dans la soirée...
Je regarde alors ma fanatique de la Sainte-Flanelle dans mon rétroviseur, je rigole en me disant qu'à sa place je ne me mettrais pas ça dans le visage.
Hier soir, le Canadiens a remporté le titre de sa division et je viens de retrouver cette fameuse cravate dans le fond de mon garde-robe. Je crois que je vais me la mettre autour du cou le temps des séries...
— Pis je te l'avais-tu dit ou j'te l'avais pas dit? dit l'homme qui m'a dit où il voulait qu'on se dirige
—...
— Han t'en as eu pour ton ptit change han? J'te l'avais-tu dit où j'te l'avais pas dit?
— Arheu... peine à articuler l'autre gars qui est dans un état de baloune pétée avancé.
Pendant qu'ils font du sur place verbal, je clenche rapidement en direction du centre-ville. J'ai un peu peur que l'hébété se mette à dégobiller, mais tant et aussi longtemps que monsieur "j't'e l'avais tu dit " l'entretient, je crois que je peux continuer de peser dessus.
Les deux hommes sortent d'un club de danseuses dans l'Est puis de toute évidence, celui qui peine à articuler s'est fait payer une sacrée traite. Malgré que l'alcool fausse la donne, on peut lire dans son visage qu'il n'en revient toujours pas. Il a dû se faire faire des choses qu'on peut juste imaginer.
— J'te l'avais dit han? Continue de répéter son confrère qui lui dit à demain quand je le dépose devant un stationnement de la rue Mansfield.
— Han, euh demain? Euh... Arheu.
Je ne lui laisse pas trop le temps de se réorienter. Dès que la porte se referme, je me remets en quatrième vitesse vers Notre-Dame-de-Grâce. Sur l'autoroute Ville-Marie, j'arrive à comprendre qu'il veut aller sur Old Orchard. Il s'écroule ensuite de tout son long sur la banquette. Dans l'état dans lequel il se trouve, j'aurais sans doute pu rouler jusque sur la plage du même nom, aux États. Mais j'ne suis pas sûr que ça me tente de m'éterniser avec lui. Les vautrés se vident souvent le ventre.
Alors qu'on est sur le point d'arriver, j'entends le type derrière qui s'ébroue (dans le toupet). Sur sa rue, il se relève, m'arrête, me met dans la main quelques billets qui couvrent amplement le prix de la course et il sort sans demander son dû. Je ne prends même pas le temps de voir où l'homme entre, du bout de la rue, je l'imagine en train de chercher son trou de serrure.
De retour « Downtown» j'arrête le taxi devant trois filles qui sortent du Cheers sur Mackay. Elles s'assoient toutes les trois derrière et une d'elles nous montre une cravate, celle de mon dernier passager. Une belle cravate bleue avec des CH dessus. Elle est toute fière de sa trouvaille et pousse sa fièvre du hockey jusqu'à se la passer dans le visage en chantant des Go Habs Go.
Je repense alors à la course précédente et me dis que c'est loin d'être un hasard si le type a laissé sa cravate là. Dieu sait par où elle est passée dans la soirée...
Je regarde alors ma fanatique de la Sainte-Flanelle dans mon rétroviseur, je rigole en me disant qu'à sa place je ne me mettrais pas ça dans le visage.
Hier soir, le Canadiens a remporté le titre de sa division et je viens de retrouver cette fameuse cravate dans le fond de mon garde-robe. Je crois que je vais me la mettre autour du cou le temps des séries...
12 Comments:
La cravate aura fais du chemin .....
j'espère qu'elle te portera bonheur ;-)
je suggère tout de même de la laver ;)
...y'en a qui font juste "pas se raser" aussi, hein... ;-)
Pourquoi ne pas l'échanger au Centre Bell contre le dernier vidéo de Kovalev ???
Vous avez espoir que votre cravate vive la même aventure? Nous diriez-vous alors ce que l'autre avait dit à l'autre?
J'te l'avais dit... c'est ce que le type à dit à l'autre... Il aurait fallu que Léon l'embarque à l'allé pour savoir :)
Elle pourra toujours te servir pour attacher un fan trop enthousiaste.
Ou une fan.
Ce n'est pas du tout le fruit du hasard… Bientôt la corde au cou ?
Merci d'écrire.
je découvre.
Les deux soeurs impertinentes rechignent un peu de ne pas avoir plus de commentaires. Alors, je me suis dit, tiens, c'est vrai, je devrais dire à ceux que je lis tout le plaisir que j'ai à le faire. Je vous lis. Et j'ai vraiment un grand plaisir à le faire. Voilà, c'est dit. :-)
Heureux dénouement!
ouachhhh tu est donc ben dégueulasse
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