31.5.07

Mettre au chemin

J'arrive devant l'adresse qu'on m'a donnée et un type m'y attend déjà avec un grand sac de sport et quelques sacs de vidanges pleins à ras bord. J'éteins le véhicule, sors du taxi pour lui donner un coup de main, le salue et me rends vite compte de la situation du gars. Dans son corps et dans son visage s'inscrit la peine d'une porte qui se referme. La tristesse d'une histoire qui se termine.

Il ressemble aux sacs verts qu'il met dans le coffre. Plein à craquer de souvenirs, de lavage de linge sale en famille, de sentiments de toutes sortes. Le temps est venu de mettre ça au chemin. L’évincé me demande de l'amener au motel le plus proche. Pas besoin de rien ajouter. Je n’ai pas l'impression que l’homme ait le goût de se faire dire : « une de perdue dix de retrouvées » ou quelques autres de ces phrases creuses quelconques. Mieux vaut garder le silence.

Dans le sien qu'il ponctue de soupirs, je devine la tempête dans son crâne. Tout comme les souvenirs et les sensations; les pourquoi, les comment et les à quoi bon doivent s'y bousculer. Au-delà des disputes, des désaccords et des défauts de l'autre, il y a ces moments où ce sont les points qui nous unissaient qui refont surface. Les petits trucs qui nous faisaient aimer l'autre. Les rires, les gestes, les caresses. Toutes ces douceurs qui vont tout droit dans le bac à recyclage des regrets.

Alors que je conduis l'éconduit vers son motel, je ne peux que penser que les relations entre humains sont bien à l'image du monde dans lequel nous évoluons. On consomme et on jette en laissant chaque fois un petit quelque chose que le temps n'arrivera pas à composter.

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44 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Touchante vérité. Chaque fois que tu racontes une de ces histoires ça vient toujours chercher quelque chose au fond de moi. Un bout de moi qui se dit que des histoires comme ça se produise tous les jours et que finalement ça nous arrive à tous. Le temps n'effacera pas tout, mais on fini toujours par faire son deuil.

5/31/2007 3:29 PM  
Anonymous Anonyme said...

super bien écrit *
j'etais déja passé, j'apprecie beaucoup ce blog que j'ai mis en favoris
bonne continuation

5/31/2007 3:31 PM  
Anonymous Anonyme said...

Des miettes de coeur, ça reste longtemps pogné entre les orteils, quand on marche sans faire attention.
Entre les lignes, tu as pris toutes les précautions pour ne pas égrainer d'avantage les noisettes de bonheur au fond des sacs. :-)

5/31/2007 3:42 PM  
Blogger appelsj said...

Ta derniere phrase en dit beaucoup sur notre monde. Tres bien ecris.

5/31/2007 3:48 PM  
Anonymous Anonyme said...

On a même envie de se retrouver nous même dans un ces maudits sacs verts dans ces moments là!
Texte très touchant.

5/31/2007 3:56 PM  
Anonymous Anonyme said...

Un texte très touchant, une réalité dure, mais débordante de vérité... c'est en plein ça, la vie...

5/31/2007 4:33 PM  
Blogger jose said...

pardon ma francais.

J´aime votre ecriture, votre forme de faire, aunque n´est pas tout compris pour moi

5/31/2007 5:33 PM  
Anonymous Anonyme said...

De passage par erreur sur votre blog, je découvre le premier billet avec délectation. Une petite nouvelle parfaitement écrite.

A bientôt peut être.

5/31/2007 6:51 PM  
Blogger HOPE said...

Bonjour cher taxibloggeur........

je me permets de m'insérer entre 2 commentaires pour te dire que je te lis assidument depuis plusieurs mois et parfois j'y laisse ma trace.

voilà on m'a tagué c'est la nouvelle tendance chez les bloggers. alors voilà je te le fais à toi, positive à l'idée que tu sauras remplir les défis . j'ose espérer que tu iras le lire tout au moins, s'il te reste du temps

au plaisir

5/31/2007 8:52 PM  
Anonymous Anonyme said...

Bonsoir,

Ce soir, je vous écrit un mot ... après des semaines de lecture ...
Votre dernier texte est touchant d'humanité et de sentiments ...et de vérité !

Bravo, bravo bravo ! J'applaudis ce talent roulant .... Superbe plume sachant manier les sentiments profonds et les petites situations comiques parfois ..

Mais ce soir, ces sacs evrts sont venus me chercher ...

En si peu de mots, que de paroles ...

Bravo encore ..

5/31/2007 10:36 PM  
Anonymous Anonyme said...

J'applaudis votre talent ...

En si peu de mots, que de paroles ..

SAvoir toucher el sgens, els faire rire, les intéresser autant avec de courts textes et des toute petites histoires, c'est vraiment remarquable.

Je vous lis souvent, mais ce soir, votre texte est empreint d'humanité telle qu'elle existe .. et votre conclusion est tellement à point!

Bravo bravo et rebravo ...

5/31/2007 10:39 PM  
Anonymous Anonyme said...

Une histoire écrite divinement bien. Un récit rempli de vérité, de vécu, de tristesse. Bravo !

6/01/2007 2:06 AM  
Anonymous Anonyme said...

L'èere du "jeter après usage" a malheureusement transformer les relations humaines en un forme d'objet de consommation rapide et superficielle. Quand "l'objet" commence a avoir des problèmes, on ne pense même pas à tenter de réparer; on s'en débarasse pour en avoir un nouveau.

6/01/2007 7:51 AM  
Blogger crocomickey said...

T'as les mots Léon. Essti que t'as les mots. Je pense que je vais appliquer pour un pocket number. Ça me semble meilleure école que n'importe quelle académie.

6/01/2007 8:15 AM  
Anonymous Anonyme said...

C'est bien triste comme situation car tout le monde aura la chance si je peux dire de se faire virer dans la vie! Un moment d'incompréhension survient et l'on comprendra qu'avec du recul... beaucoup plus tard. Je suis contente que ton client n'a pas décidé de crier sa frustration en battant son ex...

6/01/2007 8:34 AM  
Anonymous Anonyme said...

J'ai lu dans un de mes livres de psycho (et pour une fois que j'ai retenu qque chose)
Les couples ne durent plus comme ils duraient auparavant a cause de juste notre ère de consommation.
On achete on utilise et on jete... la meme chose pour la relation de couple... c'est dommage cette facon de penser .

6/01/2007 12:38 PM  
Blogger Julie said...

c'est joliement écrit... et il est bien vrai que chacune de ces personnes laisse une trace en nous, qu'on le veuille ou pas.

ce qui me rend souvent triste c'est de constater à quel point certaines personnes ont ainsi marqué ma vie, positivement ou non, sans que j'aie réussi à en faire de même...

6/01/2007 12:42 PM  
Blogger Doparano said...

Très beau texte Pierre Léon, encore une fois, Chapeau!

6/01/2007 3:18 PM  
Blogger Manon said...

Merci Léon
je suis passée par ici un jour en suivant un lien et j'y repasse maintenant pour créer des liens:créer avec le vrai, créer avec l'humain, créer avec un monde parralèlle que je n'avais jamais touché encore.
Ma perception des chauffeurs de taxi a changé ! :-)

Merci de ta lucidité, de ton humanité Léon

6/01/2007 3:55 PM  
Blogger 'Godard photos said...

Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

6/01/2007 4:26 PM  
Anonymous Anonyme said...

Ah magnifique !

belle trouvaille le coup du « bac à recyclage des regrets » !

et que dire de: « alors que je conduis l'éconduit »

et « le petit quelque chose que le temps n'arrive pas à composter »

vraiment une belle métaphore Léon, bravo !

6/01/2007 4:34 PM  
Blogger Amnésie et autres cies... said...

Mais je crois que ce sont ces miettes, justement, qui font que plus tard, quand le coeur s'est remis, nos hiers goutent moins l'amer.

6/01/2007 5:48 PM  
Anonymous Anonyme said...

Ouf Pierre-Léon.

Tes textes gagnent en intensité je dirais. Celui-ci m'a touchée particulièrement. Je ne t'ai jamais écrit auparavant, ce que tu m'avais demandé lors du lancement. Bref, chapeau, on se sentait vraiment y être. Le recyclage des regrets. Les trucs que le temps n'arrive pas à composter. Belle méditation.

Bonne continution de chemin et je te dis que je m'intéresse beaucoup plus maintenant aux chauffeurs de taxi.

6/01/2007 10:23 PM  
Anonymous Anonyme said...

Ce qui touche souvent dans tes textes, c'est la résonance qui se crée entre ce que les clients de passage vivent et ta façon de décrire. Comme une sorte d'empathie dans laquelle tu nous entraines. Après quoi, on a un peu l'impression que le monde est meilleur, malgré toutes ces misères.

6/02/2007 12:48 AM  
Blogger Elle said...

Là où une forêt à brûler... le sol est fertile.

C'est parfois difficile de voir au delà des choses, surtout quand le désastre est récent, immense et/ou inattendu... cependant, je suis de celle qui croit que toute situation à son lot de bonnes choses...

J'aime vraiment la façon dont l'histoire est racontée, dont les sentiments du personnage sont amenés et interprétés. C'est génial.

6/02/2007 1:48 AM  
Anonymous Anonyme said...

Crime que t'écris ben !
Je suis bouche bée ... encore!

6/02/2007 7:42 AM  
Blogger Borges said...

J'crois que tout le monde peut comprendre mais je supposerai que les hommes sont plus reconnaissants pour le rejet (et l'eject du ménage) que femmes. Je plains pour lui, et ceux qui s'encontrent dans cette situation.

6/02/2007 12:05 PM  
Blogger Marchello said...

On sait pas ce qui s'est passé aant et pourquoi. Un violent, un fardot ou une simple histoire qui fini mal. C'est la vie, y va s'en remettre.

6/02/2007 12:28 PM  
Anonymous Anonyme said...

C'est beau. C'est triste. C'est touchant. Touché!
Il faut avoir beaucoup sortir de sacs verts pour être aussi sensible...

6/02/2007 12:50 PM  
Anonymous Anonyme said...

Bof rien de ben grave, je suis sur qu'il est retourner chez lui car en fait mon cher pierrre-léon. C'était moi le gars...aps de joke.
Fin de la chicane

6/02/2007 1:57 PM  
Anonymous Anonyme said...

Je n'apprécie pas que l'on publie des histoires de ma vie privés..capish pierre-leon

6/02/2007 2:03 PM  
Blogger Keki said...

tres belles metaphores, effectivement, à chaque fois qu'une étape se termine, on laisse une partie de nous même..
Dernierement, j'ai vecu cette situation pour la premiere fois de ma vie et honnetement, meme apres 2 mois et demi j'ai encore de la difficulté à passer à autre chose...et lire ton texte m'a énormement touché. tres court, mais tres efficace!

6/02/2007 5:13 PM  
Blogger Pierre-Léon Lalonde said...

Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

6/02/2007 5:49 PM  
Blogger Pierre-Léon Lalonde said...

Merci pour tout ces compliments. Je suis choyé!
Je l'ai dit et me répète, tout ces bons mots sont comme de l'essence dans le réservoir. Ça aide à continuer à aller plus loin.

Pis vu le prix du gaz...

Merci encore.

6/02/2007 5:51 PM  
Blogger caroline.g said...

Il conduit l'éconduit... c'est beau, malgré tout. Et le silence... bien avisé avez-vous été de le garder.

6/02/2007 9:11 PM  
Anonymous Anonyme said...

J'en ai eu les larmes aux yeux. Tout le monde èa sa petite histoire...Vous écrivez bien, je ne me lasse pas de vous lire!

6/02/2007 10:40 PM  
Blogger REGOR said...

Beau texte Pierre-Léon.
En te lisant je voyais un de mes proches à qui s'est arrivé... quelques fois....et malheureusement, ben il le méritait.....
infidélité, mensonge, tromperie, c'était son lot !!!
Ce qui n'enlève rien au pathétique du moment.

6/03/2007 1:41 AM  
Blogger Geneviève said...

Touchant et lucide en effet..

J'espère au moins que ces déchets feront du bon compost pour la relation suivante.

6/03/2007 5:19 AM  
Blogger Amourable said...

Ce billet là aurait du être dans ton livre. Bâtard que c'est bien dit et dit si simplement. Bravo

6/03/2007 6:45 AM  
Anonymous Anonyme said...

wow..pendant un instant, j'avais l'impression d'être assis à ses coté et de ressentir...Vraiment, tu écris très bien..Lache pas!

6/04/2007 11:09 AM  
Anonymous Anonyme said...

C'est toujours agréable de vous lire. A bientôt.

6/04/2007 4:36 PM  
Blogger aigle blanche said...

Toujours un plaisir de passer ici. L'amour, ça laisse toujours des traces, un peu comme le sillon d'un bateau dans l'eau. Belles ou moins belles, selon que la mer soit calme ou déchainée. Mais sur le coup, souvent c'est la peine et le désespoir qui gagne remporte la palme. Le temps finira surement par estomper ses difficiles moments pour ne laisser, j'espère, que les miettes des petits bonheurs parsemées dans la toile de ses souvenirs...

6/04/2007 10:05 PM  
Blogger Dan said...

Quand on jette ce n'est pas justement parcequ'on n'arrive pas a consommer? Sinon, c'est vrai que dans certains moments, on respecte beaucoup plus qqn qui reussit a garder le silence. Est-ce que tu en croise souvent des gens comme ca? Je suppose que si je deprime en lisant ca c'est pcq tu ecris bien ;) Je suis content de ne pas avoir a croiser des situations aussi tristes, ne lache pas courageux transporteur!

6/05/2007 10:19 AM  
Blogger Bernard said...

Je ne sais plus ou mettre un commentaire, tellement il y aurait de choses à dire. Je vais juste rajouter un lien de ton blogue sur le mien. Peut-être que tes écrits feront réfléchir quelques'un de mes lecteurs sur la condition humaine.
Ton site m'a été référé par une de tes lectrice assidue et il fait maintenant parti de tous ces petits trésors inconnus qui sont la sur le web et n'attendent que d'être lu.
Merci d'être là et continue ton à écrire, c'est très intéressant...

6/15/2007 5:54 AM  

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